Mercredi 9 août 1944 …
…parti de Paris dans la nuit, un convoi de véhicules allemands roule sur les routes de l’Oise.

À bord de l’un des camions, gardés par des SS armés, sept commandos parachutistes de l’Armée anglaise capturés en mission au sud de Paris (1).
L’un de ces parachutistes est un Français : Jean Dupontel (nom de guerre), combattant de la France Libre.

J.Dupontel, 1952 :
« …par une ouverture dans la bâche j’aperçus un panneau indicateur sur lequel était indiqué Noailles…
Soudain dans un grincement de freins le camion s’arrêta…J’aperçus un croisement de routes…le camion se remit en marche et entra dans un champ…Au bout de quatre on cinq cents mètres…le moteur stoppa net…Sautant à terre les gardes … nous donnèrent l’ordre de sortir…
Nous fûmes alignés à la lisière de la forêt…Puis se ravisant ils nous intimèrent l’ordre d’avancer l’un derrière l’autre sous les arbres…Un sentier montait dans la forêt… Nous le suivions péniblement. Les officiers SS nous entouraient…leurs armes braquées sur nous…Nous arrivions dans une petite clairière…le Doktor Schmidt de sa mitraillette indiquait au premier ou se placer…Il s’écoula encore quelques minutes avant que nous soyons alignés. Young était à l’extrême gauche puis Walker, Baker, Wery, moi-même, Robert et Ginger à droite.
En face les Boches s’étaient reculés à peu près à six pas de nous tenaient leurs mitraillettes sous le bras. Nous attendions la mort…
Dans le lointain cinq coup de cloches s’égrenèrent dans le silence matinal…Le Doktor Schmidt sorti un papier de sa poche et le tendit au Hauptmann à ses cotés qui se mit à lire en allemand :

Après avoir été jugés et trouvés coupables par un tribunal militaire de collaborer avec les terroristes français et d’avoir ainsi nuit à la sécurité de l’armée allemande, vous êtes condamnés à mort par fusillade.

Von Capri, le jeune SS … traduisit en anglais … Les autres SS soulevèrent leurs armes… soudain au moment précis ou nos bourreaux allaient ouvrir le feu je poussai un cri effroyable … et fonçais droit devant moi, entre le jeune SS et le civil qui, saisis, n’ouvrirent pas le feu immédiatement.
Je couvris une vingtaine de pas, bondissant vers un taillis proche mais mon pied droit se prit dans une racine et je roulai à terre… Une brûlure et plusieurs claquements secs me donnèrent soudain des forces terribles »

Blessé, après avoir sans succès tenté d’obtenir de l’aide à Ponchon, Jean Dupontel parvient à atteindre Abbecourt où il est aidé par des fermiers.
Un boucher de passage à la ferme le prend en charge et vers 15h l’emmène chez lui à Hermes.
Le lendemain 10 août le rescapé est emmené à Bresles où il sera caché et présenté à la résistance locale.
Le 12 août la résistance a trouvé un anglais caché dans la forêt voisine de Bresles. C’est le caporal Ginger Jones, qui est également parvenu à échapper au peloton d’exécution.

Tout deux se joignent à la Résistance dans la lutte contre l’occupant.

jones et vaculik

Le caporal Ginger Jones et le parachutiste Jean Dupontel

Sur la route de Clermont (N31) ils interceptent 5 Allemands à bord d’une voiture. Ils s’avèrent être de la Gestapo.

Le vendredi 25 août entre 13h30 et 14h les deux parachutistes assistent depuis Bresles à un gigantesque combat aérien, au cours duquel l’US Army Air Force perd 11 chasseurs-bombardiers P-38 Lightning du 474th Fighter Group (2)

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(1) partis de Grande-Bretagne le 4 juillet 1944, les parachutistes sont largués près de La Ferté-Alais au sud de Paris. Leur mission : détruire les avions allemands stationnés sur les aérodromes autour de Paris.
Dès leur atterrissage ils sont attaqués par des Allemands en grand nombre (malchance ? trahison ? …). Après un intense combat dans la l’obscurité, neuf parachutistes sont capturés. Deux sont emmenés à l’hôpital de La Pitié, les sept autres dans les locaux de la Gestapo, avenue Foch. Après plusieurs jours d’interrogatoires sous la torture, les prisonniers sont emmenés dans les locaux de Gestapo, Place des Etats-Unis.
Le 9 août à une heure du matin, après avoir été forcés de quitter leur tenue militaire et enfiler des vêtements civils fournis par les SS, les prisonniers sont emmenés en camion, vers la Suisse selon les SS, pour y être échangés.
Il en sera tout autrement …

(2) quatre pilotes américains ont été tués lors du combat aérien, tombés à Mello, Angy, Mouy et Cramoisy. Leur mission était de neutraliser des aérodromes allemands dans l’Aisne et les Ardennes

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Suite du récit à retrouver ici : « Parachutistes et résistants combattent dans l’Oise ».


 

Source : Serge Vaculik (Jean Dupontel), 1952
Contributeur : Alain Bodel – Novembre 2020