Pétain, Philippe (1856-1951)
Maréchal de France et homme politique français, chef de l' »État français » de Vichy de 1940 à 1944. Formé à l’école militaire de Saint-Cyr, Henri Philippe Pétain mena une carrière militaire sans éclat jusqu’au déclenchement de la Première Guerre mondiale. Colonel en 1914, il se distingua dans les premières semaines de conflit et fut rapidement promu général. La bataille de Verdun, en février 1916, au cours de laquelle il parvint à stopper l’offensive allemande, fit de lui un héros national. Proche de ses hommes, habile tacticien, il fut nommé, en 1917, commandant en chef de l’armée française, alors que des mutineries éclataient sur le front. S’il fit preuve de fermeté – les meneurs furent exécutés -, il réduisit au minimum les sanctions et s’attacha à améliorer les conditions de vie des soldats.
Fait maréchal de France, en novembre 1918, nommé inspecteur général de l’armée, en 1922, il influença la politique de défense de la France, ralliant les hommes politiques de la IIIe République à une stratégie défensive, et soutint le projet de la ligne Maginot. Devenu, après la journée du 6 février 1934, ministre de la Guerre dans le cabinet Doumergue, il accepta la réduction des crédits militaires de la France dans le cadre de la politique de déflation menée par le gouvernement, puis, après 1935, se retira de la scène politique. La guerre menaçant, son prestige intact lui valut cependant d’être nommé ambassadeur en Espagne par le président du Conseil, Édouard Daladier, qui souhaitait s’assurer de la neutralité du régime franquiste en cas de conflit. Rappelé en France, le 17 mai 1940, pour occuper la fonction de vice-président du Conseil auprès de Paul Reynaud, il appuya le général Weygand, qui souhaitait mettre fin aux hostilités et réclamait un armistice.
Pétain s’opposait en cela à la conviction de Charles de Gaulle qui prônait la poursuite des combats en Afrique du Nord. L’opposition entre les deux hommes se traduisit également dans l’explication de la défaite française, Pétain entendait imputer la débâcle française aux hommes politiques, et plus particulièrement aux dirigeants du Front populaire. Après qu’il eut remplacé Paul Reynaud, démissionnaire le 16 juin, à la tête du gouvernement, Pétain proposa donc un armistice, qu’il signa, le 22 juin, aux conditions de l’Allemagne nationale-socialiste, il dit aux Français : « J’ai été votre épée à Verdun, désormais je ne serai que votre bouclier » . Entre-temps, deux de ses ministres, Pierre Laval et Raphaël Allibert (imposés par Hitler), avaient préparé la mise à mort de la IIIe République. Le 10 juillet 1940, Pétain demanda et reçut de l’Assemblée nationale les pleins pouvoirs par 569 voix contre 80 et 17 abstentions. Ce vote marquait de fait la naissance de l' »État français ».
À la tête de l' »État français » de 1940 à 1944, Pétain, handicapé par son grand âge et pressé par Hitler, délégua en grande partie le gouvernement aux vice-présidents du Conseil, Laval et Darlan notamment. Il fut cependant l’inspirateur de la « Révolution nationale » destinée à redresser la France après l’humiliation de la défaite. Cependant, sous prétexte de rétablir la grandeur de la France, les dirigeants politiques et militaires de l’avant-guerre furent jugés pour trahison à Riom, des mesures antisémites, anticipant les exigences allemandes, furent prises tandis que la démocratie était étouffée. Si Pétain n’approuva pas toujours la politique menée par ses ministres ou les actes commis par les fonctionnaires de l’État français, il en accepta la responsabilité.
Le maréchal endossa de même la responsabilité de la politique de collaboration avec l’Allemagne nazie, scellée en octobre 1940. La collaboration était supposée éviter au pays l’exploitation par l’Allemagne victorieuse. Elle conduisit en fait le régime de Vichy à s’engager toujours plus avant dans cette voie sans obtenir de réelles compensations. Les marges de manœuvre dont disposait Pétain se réduisirent peu à peu : en avril 1942, les nazis imposaient le retour de Laval. Après le débarquement allié en Afrique du Nord, en novembre 1942, et l’invasion de la zone libre par les Allemands, Pétain ne disposa plus que d’un pouvoir illusoire. En août 1944, il était contraint par les Allemands de les suivre dans leur retraite à Sigmaringen. Réfugié en Suisse après la chute du IIIe Reich, il se livra aux autorités françaises en avril 1945 alors que son procès allait s’ouvrir à Paris.
Jugé par la Haute Cour d’avril à juillet 1945, Pétain, qui ne devait prononcer qu’une courte déclaration, fut condamné (à l’âge de 90 ans) à la peine de mort, à l’indignité nationale et à la confiscation de ses biens. Gracié par de Gaulle, il fut emprisonné à l’île d’Yeu où il mourut en 1951.